Très tôt Albert Camus s'est intéressé au théâtre. En 1936,
il fonde le Théâtre du Travail à Alger avec de jeunes intellectuels
révolutionnaires, étudiants plus ou moins imprégnés de marxisme, mais aussi
des artistes et des ouvriers, généralement militants.
Après sa rupture avec le Parti Communiste, Albert Camus dissout le Théâtre du
Travail qui renaît bientôt sous le nom Théâtre de l'Equipe, dont voici le manifeste :
"Le Théâtre de l'Equipe demandera aux oeuvres la vérité et la
simplicité, la violence dans les sentiments et la cruauté dans l'action. Ainsi
se tournera-t-il vers les époques où l'amour de la vie se mêlait au désespoir
de vivre : la Grèce antique (Aristophane, Eschyle), l'Angleterre élizabethaine
(Forster, Marlowe, Shakespeare), l'Espagne (Fernando de Rojas, Calderón, Cervantes),
l'Amérique (Faulkner, Caldwell), notre littérature contemporaine (Claudel, Malraux).
Mais d'un autre côté, la liberté la plus grande régnera dans la
conception des mises en scène et des sentiments de tous et de tous les temps dans des
formes toujours jeunes, c'est à la fois le visage de la vie et l'idéal du bon
théâtre. Servir cet idéal et du même coup faire aimer ce visage, c'est
le programme du Théâtre de l'Equipe."
Les adaptations
Albert Camus avait déjà effectué des adaptations à l'époque
du Théâtre de l'Equipe, mais cette occupation devient plus importante entre 1953 et 1958.
On a souvent dit qu'à la suite de l'Homme Révolté, il avait traversé
une crise qui l'avait empêché de travailler comme il l'aurait voulu : il a écrit
les nouvelles qui constitueront L'Exil et le Royaume et La Chute et a comblé
le vide en traduisant et en adaptant des oeuvres. Il ne faut pourtant pas croire que le théâtre
n'est qu'un pis-aller; il constitue pour Camus une passion et un refuge où il peut se
montrer tel qu'il est.
Enfin, sa grande préoccupation est le renouveau de la tragédie moderne : il s'exerce
en quelque sorte, en traduisant et adaptant, en même temps qu'il offre des rôles
à ses amis acteurs et metteurs en scène. C'est dans cet esprit qu'il va de Calderón
à Dostoïevski en passant par Faulkner.
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